ÉQUATEUR : TRISTESSE ET DOULEUR. Pedro Pierre

Le nombre de morts indigènes s’accumule déjà – on parle de trois personnes –, des dizaines de disparus – comme le fait le gouvernement actuel –, plus d’une centaine de personnes sont détenues et combien sont blessées ? Tout cela pour revendiquer leurs droits, pour la défense de l’environnement, pour les droits civiques des nationalités indigènes reconnus par la Constitution, pour des lois qui renforcent le néolibéralisme, la répression, la spoliation des citoyens, les privatisations, pour – énièmement – un référendum truqué prônant l’installation de bases militaires étrangères en Équateur, la suppression des aides gouvernementales aux partis politiques, la suppression du Conseil de participation et de contrôle social, privant ainsi les Équatoriens de leur pouvoir, et pour d’innombrables autres avantages accordés aux super-riches.
Ceux qui sont partis avec le soi-disant « convoi humanitaire » ont-ils vu cela ? Des militaires, principalement des militaires, se sont rendus de nuit et sans prévenir à l’endroit où les militaires venaient d’assassiner Efraín Fuerez, un chef de communauté et père de famille, dans une zone sous couvre-feu, où internet et même l’électricité étaient coupés… et où les comptes bancaires des fonctionnaires locaux étaient gelés. Le convoi, dit-on, était accompagné du président en personne et de trois ambassadeurs, dont le nonce du Vatican, qui se sont plaints d’avoir été lapidés ! Et qu’ont-ils distribué à minuit ? Des bons et des chèques sans provision, des bougies, de l’eau bénite ?
Ces trois ambassadeurs ont-ils compris la réalité, ou bien ne l’ont-ils pas voulu, ou ont-ils voulu la déformer en adhérant à la rhétorique et à la violence militaire du gouvernement ? Ils ont protesté pour les soldats détenus (17 ?) et les blessés (12 ?), mais pas pour les autochtones… mais ils ont oublié de mentionner Efraín Fuerez et les autochtones touchés. Escortés par des soldats armés et un président indolent et menteur, ils ont appelé à la paix… sans dénoncer la violence d’un « système qui tue », comme l’a dénoncé le pape François. Ils ont appelé au dialogue, comme ils l’ont fait en 2019 et 2022, sachant comment ces dialogues se terminent, même en présence d’un évêque et d’une religieuse.
Dans quel genre de pays vivons-nous ? Où est l’aide de l’Église catholique aux pauvres ? Où est la voix prophétique des pasteurs et la présence bienveillante du clergé ? Un pays saigne, meurt de faim, manque de soins médicaux, est absent de l’école, ne peut pas étudier dans l’enseignement supérieur, ne trouve pas d’emploi avec un niveau de scolarité de 3/4, des centaines de personnes meurent dans les rues, des milliers sont victimes d’extorsion et des dizaines sont kidnappées… Les médias grand public occultent ces réalités, proclamant le brillant « nouvel Équateur » que le gouvernement et ses tribunaux achetés revendiquent.
Nous sommes tous complices et responsables de ce qui se passe dans notre pays, et c’est pourquoi nous avons tous un rôle à jouer. En négligeant le peu qui nous incombe, nous aggravons la catastrophe nationale actuelle. « Si vous êtes neutre, vous avez déjà choisi le camp des oppresseurs », a déclaré l’évêque sud-africain Desmond Tutu. Que la voix de Mgr Leonidas Proaño ou le témoignage de Mgr Oscar Romero, que le pape François lui-même a qualifié d’« évêque modèle » au Panama, sont bien loin de nous !
Terminons avec la prière de Mariola López, d’Espagne :
« Que la paix de Jésus soit avec vous,
afin que tu puisses te réconcilier avec ce qui ne sera jamais réalisé dans ton cœur,
Que votre présence soit une bénédiction pour tous ceux que vous rencontrerez ;
« Que vous puissiez marcher sans souffrir, que le soin des autres vies vous guide. »
« Que chacun de nous devienne un homme et une femme bénis
avec le désir de vivre, comme Jésus l’était intensément.
Que nos vies deviennent, avec lui et en lui,
de plus en plus accessible et apaisant pour les autres.
Ainsi soit-il.